de Celine Carré
Depuis plus de 5 ans, j’accompagne des
futurs adultes en formation de formateurs d’adultes, de conseillers en
insertion professionnelle, d’assistants en ressources humaines, …, d’autres adultes
en quête d’une nouvelle orientation de carrière, des étudiants en décrochage
scolaire et pertes de repères, … à un travail de connaissance de soi. A cet
effet, j’utilise les pratiques d’exploration de l’anthropoformation
(Autobiographie-raisonnée, histoire de vie, porte d’exploration, …). Il s’agit
de les amener à une « reprise » de leur parcours de vie pour
s’approprier en conscience les enseignements (connaissances, compétences,
qualités, valeurs, savoirs être, …) qui en émanent. Cette reprise du parcours
est source de reconnaissance de soi, de ses potentiels, de confiance en soi et
de pouvoir d’agir. Ainsi, ils investissent des choix professionnels, reliés à
leurs histoires de vie, qui font sens pour eux, pour leur existence d’Etres
humains libres. Ils sont alors en mesure d’ « habiter » leurs
projets et de s’invertir dans leur mise et ainsi leur donner naissance.
J’observe également, que la maïeutique de
l’écriture possède un pouvoir heuristique. Elle dévoile ainsi le passage par et
dans des instants fondateurs. Je les appelle « vides créateurs ».
René Barbier les nomme « flashs
existentiels ». Il en offre la définition suivante :
o
Il nous dit clairement le, les ressentis de ces
moments là : « Le flash
existentiel permet de découvrir soudain en nous-même un horizon inimaginable.
Un flash, un éclairement qui bouleverse une vie. Il est la prise de conscience
spécifique qui peut-être comprise comme un processus d’élucidation ultra-rapide
conduisant à un état de lucidité. Une sorte d’ouverture sur un autre système de
vision du monde qui remplace, subitement, celui qui nous fondait jusqu’alors.
Elle apparaît comme bouleversante, restructurante. Quelque chose de soi-même se
perd d’une manière définitive, aussitôt remplacée par une autre région de
connaissance du monde. En même temps, on ressent une impression de vérité absolue,
comme si notre destinée émergeait d’un chaos infini pour se donner à voir,
l’espace d’une seconde, dans un ordre vital. Tout se passe comme si la vision
intérieure de la vie du sujet était donnée en un laps de temps qui, cependant,
condense une temporalité passée et future d’une durée beaucoup plus longue. Cet
état de lucidité correspond à un temps de maturation plus ou moins long et
inconscient. De nouveaux chemins vont être dégagés sans que je m’en aperçoive.
J’en pressens l’existence intuitivement et je suis souvent mal à l’aise avec le
parcours habituel de ma vie. Quelque chose s’invente an moi et je le sais, mais
je ne saurais encore le nommer, ni même en cerner le moindre contour. Je fais
de plus en plus silence en moi et autour de moi. On me dit que je change. On ne
me comprend plus très bien. On s’éloigne de moi. Parfois, je tente l’ouverture
vers l’autre. A sa réponse, je laisse filtrer des éléments de ce tremblement de
l’être ou je me referme totalement… [1]».
Pour accompagner
l’accouchement de cette part intime des possibles de l’autre, il propose la définition
métissée suivante de l’accompagnement et de l’éducateur :
Il
commence par illustrer celles-ci avec le propos de Paolo Freire : « Personne n’éduque autrui, personne ne s’éduque
seul, les hommes s’éduquent ensemble par l’intermédiaire du monde »[2] .
Selon
lui, « l’éducation, à minima, est le fait de nourrir, prendre soin et conduire
hors de … (id). » Cela rappelle le « décentrement du connu
vers l’inconnu », ici vers ailleurs, quitter sa place, énoncé par Maela
Paul[3].
« L’éducateur
éclairera (quelqu’un) pour le mettre en état de voir clair, comprendre,
discerner le vrai du faux. (id)»
J’ajoute,
lui faire prendre conscience de ce qui se joue par ses représentations, et
l’amener à voir les choses sous un autre angle.
L’éducateur,
selon René BARBIER, « est quelqu’un d’ouvert pour trouver des éléments
qui donnent du sens au monde. Il s’adresse à quelqu’un d’autre qui a envie de
travailler avec lui. Il est concerné par l’autre et entre dans une relation de compagnonnage avec
cette personne. Il transmet une aptitude, une façon de faire, pour que l’autre
trouve sa voie, joue sa propre vie. Il suggère, sans imposer, au sujet d’autres
voies que les sentiers battus de tous temps. Il lui fait entrevoir d’autres
possibilités de vie que ceux dont il est l’objet et non le sujet autonome.
C’est l’ouverture sur l’esprit critique. L’éducation est avant tout une
transformation du regard que l’on porte sur soi-même, les autres et le monde.
Un nouveau regard qui change tout en nous permettant d’accéder à un niveau
différent de réalité »[4].
« L’éducation
vise la déconstruction de l’établi, de l’affirmé, du stable, du durable,
c’est-à-dire sur le plan psychologique, de l’identité socialement instituée.
C’est le « raclage » systématique de notre imaginaire de maîtrise et
de pouvoir (id). »
[1]
BARBIER R., université de Paris VIII, LAMCEEP, « L’implication
noétique, flash existentiel et éducation », séminaire sur
l’implication, IFORIS, Angers, juillet 2004, www.barbier-rd.nom.fr/implicationnoetique2.html,
consulté le 08/02/2015, 12 P
[3] PAUL M., « Ce qu'accompagner veut dire », Carriérologie,
Nantes, Conservatoire National des Arts et Métiers, P 121 à P 144.
[4] BARBIER
R., « Apprendre au fond
de soi », http://www.barbier-rd.nom.fr/journal/article.php3?id_article=452,
consulté le 26/08/2005.
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